Points de vue

Ce paysage que je vois tous les jours sous différents angles m’a surpris ce matin. À l’ouest où la montagne est moins élevée, il avait neigé à plus basse altitude. Soudain, j’eus une perception de la rotondité de la terre de manière étonnante. Je continuais à regarder tout en cheminant et cette vision ne s’atténuait pas. Parfois certaines vues sont des apparitions fugaces. Comme cette fois où la montagne me paru himalayenne jusqu’à temps que je reprenne conscience des nuages et que les hautes forêts laissent la place à des zébrures de lumière et d’ombre.

La première semaine où je portais le bouc, il y a fort longtemps, un collègue me regarda soudain droit dans les yeux et me fit remarquer crûment que ma bouche figurait désormais un trou du cul. Je restais bien sûr sidéré et sans voix, laissant seulement transparaître un éclair d’amusement. Je me demandais quelles pouvaient bien être ses références en la matière. Je n’avais alors qu’une faible expérience anale. Maintenant que ce déficit est comblé et que j’ai pu appréhender la douceur de cet extrême, je ne comprends toujours pas la comparaison et pourquoi le fait d’avoir quitté l’état d’imberbe avait pu déclencher cette réaction.

J’ai toujours adoré les perceptions et représentations, les questions de référentiel et la diversité des points de vue. On peut gloser à l’infini, dans la mesure où l’on reste dans l’empathie et la compréhension mutuelle.

Ce jour-là le ton relevait du verdict et je n’avais pas discouru, le lieu - l’accueil d’un établissement réputé - ne s’y prêtant pas. Je gardais mon bouc néanmoins et je m’étais dit que peut-être était-ce lui le trou du cul.