Subversion Marine

Quand j’écoute un professeur de lettres classiques parler, je suis forcément au garde-à-vous. Même si la chose militaire n’est pas mon truc, que j’ai dû mal à rester droit immobile. Mais une personne qui a enseigné le grec et le latin, ça m’impressionne. Quelqu’un qui connaît le sens des mots, jusqu’à leur étymologie, est forcément quelqu’un qui pèse ce qu’il dit sans aucun écart. Tiens, je discute souvent avec un professeur de philosophie, dans un autre genre c’est clair net et précis et on ne divague pas sur les marges. Et tout le monde est tombé dans le panneau de la submersion migratoire, qui plus est dans ce contexte de changement climatique. On voit les vagues qui s’abattent sur la côte, le rivage qui s’effondre, les maisons qu’on abandonne. On est frappé par la Vilaine qui déborde, inonde les rues et les champs. Mais je t’arrête tout de suite, quoi qu’en pensent les fachos qui revendiquent l’expression depuis quelques lustres et prétendent défendre l’identité française en parlant un français approximatif. Après la submersion, l’eau reflue et reprend à peu près sa place. Quand la mer reste sur les terres et envahit peu à peu ou brutalement, les géologues le savent bien, on parle de transgression marine. Et là ça peut durer très longtemps. Tu me diras, et le sens figuré ! Justement, quand tu es submergé par les émotions, je te souhaite que ça ne dure pas et que ça reflue. Sinon on appelle cela un burn-out. Mais qu’a donc voulu nous dire le premier ministre ? As-t-il fait une confusion avec subversion ? Pensait il alors à l’action de bouleverser, de détruire les institutions, les principes, de renverser l'ordre établi et sa langue aurait fourché à l’insu de son plein gré ? Ou a-t-il tout « simplement » fait une transgression verbale sans se rappeler d’où vient cette expression ? Comment la langue d’un politique peut fourcher à ce point ? Et dans la foulée, sondage, nous serions 7 français sur 10 à partager ce sentiment contre toutes données et statistiques en la matière. Nous sommes désormais passés à une autre époque, celle où l’on gouverne selon des perceptions et représentations, en se fichant de la réalité. L’extrême centre n’en finit pas de nous montrer sa vraie nature.  J’avais quelques illusions sur François Bayrou, elles (se) sont définitivement barrées. La justification qu’il donne avec son histoire de proportion, en réalité indéfinissable, qui de fait admet le communautarisme et efface toute idée d’intégration, et sa stigmatisation qui généralise la délinquance à tous les étrangers, l’enfonce encore un peu plus au fond de son seau de bran.