dimanche 29 janvier 2017

La vergonha (la honte)

Je me souviens d'un couple de retraités vénérables chez lequel je me réfugiais parfois enfant pour échapper à la reine-mère lors de mes vacances au pays taiseux. Il avait bien vécu d'une vie sage, laborieuse et économe. Il coulait des jours paisibles au bord de la rivière dans un village ni plus ni moins méchant que les autres, mais où la vindicte populaire a vite fait de mettre en examen sur la base de convictions alimentées moins par des faits avérés que par des inimitiés ancestrales dont on a la plupart du temps oublié l'origine.
L'homme quand il ne cultivait pas son jardin s'impliquait pour une association. Il arriva qu'après une manifestation il manquait quelque chose comme 300 francs dans la caisse.
Cet homme bon comme le pain fut accusé.
Leurs enfants qui vivaient loin s'inquiétaient. Le téléphone n'était plus décroché. L'un d'entre eux fit la longue route.
Il les trouva tous les deux allongés sur le lit dans le noir en silence.
Ils avaient décidé de se laisser mourir de honte.

Comme échelle de valeur, je crois me souvenir que ces 300 francs représentaient environ ce que me donnaient mes parents comme argent de poche au trimestre. Mais quand mon grand-père me donnait la pièce, exceptionnellement, sur injonction de la reine-mère, c'était 10 francs. 

Ces gens-là avaient le sens des valeurs et de l'honneur.





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