samedi 11 octobre 2014

Instantané (2)

Stan ne s'est pas connecté. En fait, il a dormi toute la journée. J'ai passé la matinée à bosser dans ce bistrot de quartier. Les figures stylées et éternelles étaient là. J'écoutais d'une oreille distraite ces brèves de comptoirs anodines, ces voix tonitruantes, gravement atteintes par l'excès de clope ou chevrotantes de la cuite de la veille. Le patron avait fini par me ramener un croissant et je pianotais péniblement sur mon ordi, la souris n'accrochant pas très bien. De temps en temps je regardais mon appli, guettant les lumières rouges.
Tio s'était connecté. On discutait depuis 10 jours. C'est un joli gars de 30 ans, très attirant. J'étais prêt à lui porter les croissants mais il ne reçoit pas, par souci de discrétion. C'est vrai qu'il y a toujours un risque de retrouver l'amant d'une nuit éploré sous ses fenêtres... Nous avons donc simplement parlé. On est sensé se voir une prochaine fois où je dormirai à l'hôtel...
Et puis soudain, la lumière de Kouros est apparue. Lui c'est un jeune quinqua dont le sourire m'avait séduit. Peu de discussion mais très vite une option de rencontre. Il restait une heure avant mon rendez-vous pro et avant son équipée familiale. J'étais à 10 mn de chez lui. Il a fini de me guider alors que je marchais d'un pas rapide. 
En bas de l'immeuble, une rombière était à sa fenêtre. J'ai pensé à la discrétion de Tio. Recevoir des garçons peut en effet faire jaser quand on n'est pas sorti du placard. Je ne crois pas que c'est le cas de Kouros à la voix assez typée même si ça ne veut pas dire grand chose. Je connais des pères de famille de 5 enfants très catho qui ont la même voix...
La porte de l'appartement s'est ouverte sur son grand sourire. Il était apprêté pour son dimanche en famille. Le parfum d'YSL saturait l'air du séjour. J'ai pensé à Lucien qui en usait aussi il y a une quinzaine d'années. Je l'avais même adopté un temps. Une récurrence, adopter le parfum de mes coups de cœur pour les sentir près de moi. Avec Maurice j'étais passé sur Armani code.
J'avais abandonné Kouros depuis longtemps, en murissant ce parfum devenait lourd et encore plus entêtant.
On s'est assis sur le canapé avec un jus d'orange. La chemise de Kouros laissait transparaître ses pectoraux tendus. Son visage était étonnant, à la fois jeune et marqué, une impression curieuse se dégageait de cet ovale. Je n'arrivais pas y trouver une permanence de beauté mais les éclats de ses yeux et les plis de son sourire le rendaient magnifique. Nous parlions. Je me demandais qui oserait tendre la main le premier. Je l'ai fait en jouant avec le premier bouton fermé de sa chemise pour libérer son torse. Il a posé sa main sur mon bras avec un doux regard. J'étais vraiment bien ce matin là, sans appréhension aucune, et capable d'entreprendre. Juste ce parfum omniprésent. La baie vitrée donnait une large vue sur la ville. Les clochers du centre historique dépassaient les toits de loin en loin. C'était agréable de s'étreindre dans un endroit si clair. Nous pouvions être observés des immeubles environnants mais nous étions déjà nus sur le divan. Sa bouche avait une saveur étrange.
Il avait un corps de nageur, des muscles souples qui ne donnaient pas son âge et un large bassin où se perdre avec tendresse, les bras autour de sa taille et les lèvres collées à son ventre et plus bas encore.
J'étais impressionné par son sexe massif et ciselé.
Tu crois ?
Et au fait tu es passif ou actif ?
Actif.
Et toi, je n'ai pas revu ton profil.
Les deux, mais...
Je ne me voyais pas recevoir ce trop bel étalon.
Ces vingt minutes savoureuses m'ont paru des heures. 
Il avait juste un peu de mal à venir et ce fut difficile pour moi de l'aider après l'intensité qu'il m'a offerte.
On s'est douché tranquillement l'un après l'autre en discutant.
Kouros flottait toujours dans la pièce.
Nous nous sommes quittés sans un au revoir. Qui sait ?
En fin de journée Kouros flottait encore autour de moi.


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