mercredi 14 décembre 2016

Entre deux rives

Je suis réveillé depuis quatre heures moins le quart du matin. Je viens de prendre le petit déjeuner au lit et je rêvasse avant de me lever définitivement. Je pense à ce billet que je voudrais écrire aujourd'hui car je tiens à publier à cette date. Des idées sont passées depuis hier. Soudain l'évidence s'installe. Je vais non je dois parler de ce petit détail. À cet instant je ne pense plus qu'à ça et je me lève. Je vais te le confier au risque de retarder ce que j'ai à finir en ce petit matin avant de me taper deux heures de route pour une réunion dont je n'ai pas vraiment envie.
De tout temps, j'ai été attentif à cette portion du trajet, sur le côté aval du versant, avec le village perché sur le rocher, et en bas le pont qui surplombe la rivière d'une seule arche. J'y savais des ancêtres du côté de ce grand-père que je n'ai pas connu. Je n'y étais jamais allé, on ne savait même plus dans quelle maison ils avaient vécu.  Mais je scrutais toujours ce paysage comme on regarde un carte postale fanée.
Dans la courbe qui suit, une fenêtre dans la haie qui borde la route donne sur un grand pré qui précède au loin une petite maison de pierre aux volets rouges, un moulin j'imagine avec un canal qui se cache derrière un long mur arboré. Combien de fois ai-je imaginé, la vie dans cette petite maison. Les pièces qu'on aère à l'arrivée des vacances, les draps épais à l’odeur de lavande. Un peu plus tard, les enfants qui jouent et Maurice qui grandit d'été en été.
Depuis quelques années, c'est là que se fixait mon regard quelques fractions de seconde offertes par la limitation à 70 km/h.
Un jour, je suis enfin allé visiter le village, j'étais ému à l'idée que je risquais de le rencontrer. Au cimetière, j'ai lu tous les noms sur les tombes, peut-être nos aïeux gisaient-il côte à côte ? Je n'en ai vu aucun signe.
Lors d'un de mes derniers retours au pays taiseux, au premier passage, je n'ai plus distingué la maison. Au second, j'ai compris que les volets avaient changé de couleur. J'ai réalisé que les enduits avaient été refaits. La vielle dame avait dû mourir. La maison se faisait une nouvelle jeunesse. De nouveaux enfants allaient venir babiller.
Une dernière occasion de croiser Maurice s'estompait. Il reviendrait peut-être car il avait des amis ici, je crois, mais que deviennent les amis quand les habitudes ont disparu ? Quel goût aurait encore la baignade à la rivière quand le temps s'est enfui et que les souvenirs ne sont plus que quelques traces dans le cœur.

La troisième année de ce blog s'achève aujourd'hui.
J'hésite à continuer. Peut-être n'ai-je pas trouvé ma voix, peut-être ne ris-je pas assez.


4 commentaires:

  1. Bon anniversaire au blog!!! tu hésites à continuer? pourquoi hésiter? il suffit de publier quand tu en as envie, et l'inspiration, ce que je fais en ce moment. En revanche, voir ton blog muet me serait difficile à supporter, moi qui adore ta prose et ta pensée. MAis tu le sais, je suis un fan, et inconditionnel. Donc, n'arrêtes pas, s'il te plait....
    Je pense que tu sais rire aussi...
    et quant à la suite avec MAurice on ne sait jamais ce que l'avenir nous réserve. En tous les cas, le temps semble aussi avoir magnifié cette belle histoire..

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    1. Merci Arthur ! Oui, il suffit de publier quand...
      Mais je vais continuer un peu car je n'en ai pas fini avec Maurice, que je croise si souvent au détour de tant de chemins...

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  2. Hésiter; pourquoi? Tu peux faire des pauses, revenir, repartir... J'ai commencé mon premier blog en 2004, j'ai parfois fait des pauses, mais finalement je suis toujours là. Il te reste juste à trouver un rythme qui te convienne sans que ça devienne une obligation. Même si je laisse pas ou peu de traces de mes passages sur tes écrits, c'est toujours un plaisir de lire tes billets.

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    1. Pourquoi ? Par exemple....
      Par pudeur : hésiter à continuer à me raconter de la sorte et parfois si crûment.
      Par peur : celle d'être un jour découvert par ceux qui me connaissent autrement et de n'être pas compris, et par voie de conséquence, par peur de la honte ou de l'index qui pourrait suivre.
      Par fierté : celle de ne pas vouloir que ce blog soit pris comme le pâle reflet ou comme une imitation d'autres blogs...
      Et aussi parce que je suis question et que toujours question t'ouvre les yeux mais aussi te tourmente.
      Et puis aussi, une histoire de l'été, une sorte de nouveau Maurice, pas encore racontée, mais qui m'a laissé un goût amer jusqu'à ces derniers jours où j'ai enfin tourné la page.
      Et enfin, parce que ce chemin caillouteux, aqueth sendèr calhabut, comme une calade cévenole...
      Merci Patrick et joyeux Noël !

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