jeudi 1 décembre 2022

Petite sortie du placard

J'ai toujours eu de bonnes copines. Longtemps j'ai soupiré amoureusement avant de me rendre compte que je n'étais pas un objet sexuel pour elles, qui avaient détecté bien avant que je ne le soupçonne que je préférais les garçons. Cela ne m'a pas empêché de rencontrer la femme de ma vie à une époque où tout n'était pas encore bien clair et assumable pour moi. Depuis quelques mois, une relation féminine professionnelle s'était développée au delà du convenu et je voulais bien croire qu'il s'agissait du retour des bonnes copines d'antan. J'acceptais une relation épistolaire parallèle à nos échanges pros. Je dus me rendre à l'évidence, bien naïf que j'étais, que notre frêle esquif n'en finissait pas de dériver sous des ponts des soupirs. Un premier ultimatum en marge d'un séminaire me fit carrément fuir avec des explications simples mais vaseuses pour qui ne s’inquiète pas de relations extraconjugales avec des collègues. J'étais devenu tétanisé par la situation, essayant de mettre fin à ces échanges de missives sans y arriver. Des mois plus tard, un autre séminaire agrémenté de soirées en ville nous réunîmes. J'étais dans la ville de Maurice. J'avais repris contact et après dix années de silence il m'avait répondu pour me dire simplement qu'il ne serait pas disponible. Je le priais de me donner néanmoins quelques nouvelles mais le fil de la brève conservation se rompit. Je voulais croire que ce n'était qu'un suspens mais plus d'un mois plus tard je crois qu'il n'y a rien à espérer. Dans cette ville où planait le souvenir de mon plus bel amant, je fuyais une nouvelle fois ma bonne copine déclenchant une incompréhension doublée d'une bordée de reproches. Je n'avais pourtant jamais rien promis et j'avais toujours été clair à mon sens, mais n'avoir pas rompu cet autre fil pouvait témoigner d'une ambiguïté puisque finalement je n'avais rien expliqué et que ne pas céder à sa tentation était une sorte d'affront, une résistance inédite qu'elle vivait mal eu égard à ses antériorités. Après une soirée collective, je pris mon courage à deux mains. A la table d'un bar sombre des limes de la vieille ville, je lui avouais mon secret. C'était la première fois que je franchissais ce cap dans milieu professionnel. Ce faisant je coupais court à tout espoir pour elle tout en lui témoignant d'une infinie confiance. Je n'ai pas trouvé cela si difficile et il m'en reste un grand soulagement d'avoir franchi un tel cap, certes tout petit car dans le domaine de la confidence et sans rapport avec un coming-out de grand jour.

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