Pablo mon ami qu'avons-nous permis
L'ombre devant nous s'allonge s'allonge
Qu'avons-nous permis Pablo mon ami
Pablo mon ami nos songes nos songes
Nous sommes les gens de la nuit qui portons le soleil en route
Il nous brûle au profond de l'être
Nous avons marché dans le noir à ne plus sentir nos genoux
Sans atteindre le monde à naître
Pablo mon ami qu'avons-nous permis
L'ombre devant nous s'allonge s'allonge
Qu'avons-nous permis Pablo mon ami
Pablo mon ami nos songes nos songes
Je connais ce souffrir de tout qui donne bouche de tourment
Amère comme aubépine
A tous les mots à tous les cris à tous les pas les errements
Où l'âme un moment se devine
Pablo mon ami qu'avons-nous permis
L'ombre devant nous s'allonge s'allonge
Qu'avons-nous permis Pablo mon ami
Pablo mon ami nos songes nos songes
Pablo mon ami tu disais avec ce langage angoissant
Où se font paroles étranges
N'est large espace que douleur et n'est univers que de sang
Si loin que j'aille rien n'y change
Pablo mon ami qu'avons-nous permis
L'ombre devant nous s'allonge s'allonge
Qu'avons-nous permis Pablo mon ami
Pablo mon ami nos songes nos songes
Pablo mon ami le temps passe et déjà s'effacent nos voix
On n'entend plus même un cœur battre
Tout n'était-il que ce qu'il fut tout n'était-il que ce qu'on voit
Tout n'était-il que ce théâtre
Pablo mon ami qu'avons-nous permis
L'ombre devant nous s'allonge s'allonge
Qu'avons-nous permis Pablo mon ami
Pablo mon ami nos songes nos songes
Louis Aragon, Élégie à Pablo Neruda, 1966.
Poème mis en musique et chanté par Jean Ferrat, 1995.
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